Ventes prisées
C’est le même rituel presque chaque matin.
J’ouvre un œil dans un demi-sommeil, elle, elle est déjà réveillée. Depuis combien de temps, je ne saurai dire.
Je ne sais pas quelle heure il est, j’ai du mal à émerger du brouillard. Il fait encore tout noir, dans la chambre, les volets nous isolent complètement du soleil. Dehors, le jour doit pourtant être là, mais impossible de le deviner.
Et pourtant, il y a bien une petite source de lumière.
Là, juste à côté de moi.
Je la vois en train de parcourir frénétiquement son téléphone de ses doigts graciles. Elle est concentrée. Elle cherche, tapote, ouvre, reviens, recommence. C’est fascinant à observer. Il y a le son, aussi. Des soupirs, des « oh, c’est bien ça » murmurés pour elle-même. J’arrive à distinguer des chaussures sur le petit écran. Beaucoup de chaussures. Toujours des chaussures.
C’est une course chronométrée. Sur ce fameux site bien connu, elle me l’a expliqué, il y a en ce moment des ventes avec rabais importants sur plein de marques qui sont ouvertes à 9h pile. Et à 9h01 – apparemment – il n’y a déjà plus grand chose. Le concept est donc de remplir le plus vite possible son panier, en choisissant juste la taille qui va bien, et tant pis si c’est moche. On triera ensuite. Alors ça défile. En 23, en jaune, avec des paillettes, en 24, en rose, ouvertes, fermées, montantes …
J’entends un « oh la salope » envoyé contre je ne sais quelle furie qui aura, avant-elle, réussi à pécho l’ultime paire qu’elle convoitait aussi.
C’est la guerre …
Et puis enfin elle y arrive. Elle a réussi à valider la bonne paire, dans la bonne taille. Elle kiffe.
Elle aurait gagné un marathon, je sais pas si elle serait aussi contente. Chelou.
Au petit déjeuner, ça continue. Entre deux biberons et deux câlins (car ma femme est une mère extraordinaire, qu’on se le dise), elle prend encore le temps de jeter un œil à ces ventes prisées. On ne sait jamais. Car comme toutes les meufs font comme elle, et remplissent leur panier avant de jeter ce que finalement elles n’aiment pas, il y a du stock qui revient disponible un peu plus tard. Faut le savoir …
Et puis le temps passe. Et puis le facteur arrive.
Et la maison se retrouve encore avec l’un de ces cartons que j’ai fini par reconnaître de loin.
Les premiers temps, j’étais curieux. J’ouvrais.
C’était pas super compliqué non plus.
C’est écrit :
Mais en fait, il ne faut surtout pas faire ça. JA-MAIS.
Je me suis déjà fait surprendre en train de « tirer pour ouvrir », j’ai eu l’impression de commettre un crime.
« maiiis noooooooon !!!
Elle s’est adressée à moi comme si j’étais demeuré.
Il ne faut jamais faire ça car le carton, dans 60 % des cas (statistiques obtenues par la méthode des quotas sur un échantillon représentatif de 341 paire de chaussures pour fille), les pompes elles repartent d’où elle viennent. Dans le même carton. Qu’il faut donc ouvrir par le côté.
C’est compris ?
Je vous laisse, j’ai des trucs à faire.
C’est vrai qu’on fait de super économies avec ces ventes prisées. D’ailleurs, je n’en ai jamais fait autant depuis que… j’ai arrêté de recevoir les notifications 🙂
Faut dire qu’à 9h00, c’est rare que je sois assez réveillé pour choisir.
Santé.
Je ne sais pas comment tu fais pour ne pas être réveillé à 9h … Ou alors c’est quand il n’y a point d’enfant ? 🙂
bonjour,
j’adore votre blog. je crois que je serai aussi comblée comme ta femme puisque je suis à 4semaines de grossesse et mon mari parle déjà avec le bébé, il croit que c’est une fille
Eh bien je lui souhaite, et si c’est un garçon c’est pas grave ! Bonne grossesse, tenez moi au courant !!